La Règle du « Fuck Yes! »
Commencez donc par bien réfléchir à la question suivante : pourquoi vouloir être avec quelqu’un qui n’est pas emballé-e ?
Il y a un vaste marécage dans le domaine des rencontres amoureuses et dans lequel beaucoup de monde s’enlise : quand les sentiments sont ambigus, ou bien quand l’un des deux a des sentiments bien plus forts que l’autre. Cette zone d’indécision est la cause de vrais problèmes. Pour les hommes, il s’agit souvent de savoir s’il faut persévérer et continuer de chercher à séduire une femme qui semble tiède ou qui se comporte comme une girouette. Quand on est une femme, la question qui se pose souvent est de savoir ce qu’il faut faire quand un garçon suscite chez soi des sentiments ambigus.
Elle a dit qu’elle n’était pas intéressée mais elle flirte quand même avec moi, donc qu’est-ce que je dois faire pour la séduire ?
Je sais qu’elle m’apprécie mais elle n’a pas rappelé le week-end dernier, que dois-je faire ?
Il est plein d’attention quand il est là, mais il n’est pas souvent là. Qu’est-ce que ça veut dire ?
La plupart des conseils de séduction servent à orienter les gens dans le marécage. Dites ceci. Ecrivez-lui cela. Appelez-le tant de fois. Portez telle tenue.
Très souvent, ces conseils tournent autour de l’analyse minutieuse des comportements des uns et des autres, au point que certain-e-s passent davantage de temps à analyser les détails qu’à profiter de la rencontre.
Et l’inconfort du marécage amène de nombreuses personnes à des conduites manipulatrices et des mélodrames inutiles. C’est le genre de circonstances dans lesquelles on décrète qu’il faut attendre qu’un mec ait payé x fois le resto avant qu’on puisse l’inviter au lit. Où bien que les hommes doivent respecter une transition entre la phase d’attraction et la phase de confort en réussissant l’épreuve trois fois avant de pouvoir passer aux étapes suivantes.
Ces conseils peuvent sembler futés et intéressants à certaines personnes embourbées dans le marécage. Mais ils ratent le cœur du problème. Si on se retrouve dans le marécage, c’est que c’est déjà mort.
Donc je repose ma question : pourquoi vouloir être avec quelqu’un qui n’est pas emballé ? Quand l’autre n’est pas chaud aujourd’hui, pourquoi irait-il changer d’avis demain ? Pourquoi devrais-je faire un effort pour convaincre quelqu’un de sortir avec moi quand ce quelqu’un ne fait pas d’effort pour me convaincre moi ?
On ne reste pas ami avec quelqu’un qui nous laisse régulièrement tomber. On ne persévère pas dans un boulot quand on n’y est pas payé. Alors pourquoi s’acharne-t-on parfois à vouloir sortir avec quelqu’un qui n’est pas intéressé ? Pourquoi vouloir s’abaisser à ce point ?
L’entrepreneur Derek Sivers a écrit un jour dans un article « Si un truc ne me donne pas envie de répondre « fichtre oui ! », alors je dis non ». Ça lui a bien servi dans le monde des affaires et maintenant je reprends son conseil dans le contexte des rencontres amoureuses. Mais comme je suis plus vulgaire, j’appellerai ça la règle du « fuck yes! » ou « non merci »*
[NdT : plutôt qu’une mauvaise équivalence, et pour garder la patte de l’auteur, j’ai préféré garder l’expression « fuck yes! » telle quelle.]
La règle du « fuck yes! » stipule que quand on veut se lancer dans une histoire avec quelqu’un, quel que soit le type d’histoire, il faut que la personne donne envie de répondre « fuck yes » pour que ça vaille la peine de continuer.
La règle du « fuck yes! » stipule aussi que quand on veut se lancer dans une histoire avec quelqu’un, quel que soit le type d’histoire, il faut que l’autre personne ait elle aussi envie de répondre « fuck yes! » pour que ça vaille la peine de continuer.
On peut donc voir que la règle du « fuck yes! » ou bien « non merci » nécessite que les deux parties soient enthousiastes à l’idée de passer du temps ensemble. Pourquoi ? Parce que si on a suffisamment d’estime de soi, on comprend qu’on n’a pas de temps à consacrer à des personnes qui ne suscitent aucun engouement en nous ou bien qui n’en éprouvent pas à notre égard.
Cela peut sembler un peu idéaliste aux yeux de certains. Mais la règle du « fuck yes » peut considérablement simplifier vos rencontres amoureuses :
- on ne se fait plus balader par des personnes qui ne sont pas trop emballées. Finis les atermoiements et les doutes. Finies les déceptions et la colère qui s’ensuivent inévitablement. On regagne en estime de soi et on met fin soi-même aux histoires bancales, sans attendre de se faire larguer.
- on arrête de faire des avances à des personnes pour qui nos sentiments sont en réalité ambivalents, et tant pis pour notre ego. Tout le monde est passé par là : on n’était pas super emballé-e par quelqu’un mais on a entretenu l’histoire, faute de mieux. Et il y a quelques histoires qu’on préférerait ne pas recommencer. Fini, tout ça.
- les questions de consentement sont immédiatement réglées. Si quelqu’un vous mène en bateau, joue à se laisser désirer, ou au contraire vous met la pression pour vous faire faire quelque chose que vous n’êtes pas sûr-e de vouloir : maintenant la réponse est simple. D’ailleurs, comme je le dis souvent en ce qui concerne les rencontres amoureuses : « s’il faut quémander, c’est que c’est non ».
- [NdT : je zappe deux lignes un peu hors de propos sur l’intérêt de poser des limites personnelles claires, mais l’article cité est intéressant]
- et maintenant, on sait toujours où on en est avec l’autre. Puisqu’on libère beaucoup de temps et d’énergie à ne plus s’occuper de gens moyennement motivants ou moyennement motivés, on se retrouver à ne passer du temps qu’avec des personnes avec qui les intentions sont explicites et enthousiastes. Chouette !
La règle du « fuck yes! » est applicable pour les plans d’un soir, pour les rencontres amoureuses, et même pour les amitiés. Il se peut que vous n’ayez rien en commun avec ce barman mais il est séduisant et intéressé : est-ce un « fuck yes! » pour le sexe ? Si c’est oui, banco.
Vous vous êtes entichée de ce garçon hyper gentil, sauf qu’il laisse passer des semaines entières sans vous appeler et disparaît immédiatement après trois verres et une partie de jambes en l’air. Vous vous demandez s’il vous apprécie réellement ? Est-ce que ses prétextes comme quoi il est toujours super occupé sonnent bidon ? En tout cas, ça n’a pas l’air de mériter un « fuck yes! ». Donc il est temps de passer à autre chose.
Vous êtes avec une nana en train de vous rouler des pelles mais à chaque fois que vous tentez de défaire son chemisier, elle vous repousse la main. Ce n’est donc visiblement pas « fuck yes! » en ce qui la concerne, et donc c’est non : arrêtez donc de lui mettre la pression. C’est quand on est deux à s’écrier « fuck yes! » en se jetant l’un sur l’autre que le sexe est vraiment bon. Sinon, tant pis, on laisse tomber.
(Indice pour les mecs : c’est le bon moment pour lui demander pourquoi elle n’est pas à l’aise, et ce qu’elle attend de vous. Rien que de montrer comme ça que vous la traitez comme un être humain et que vous avez un minimum d’empathie suffit parfois à débloquer le malaise.)
Vous voulez revoir cette femme que vous avez rencontrée le week-end dernier sauf qu’elle ne répond ni à vos sms ni à vos appels ? Vous ne savez ni quoi lui dire ni quoi faire, alors qu’elle avait l’air d’être partante au début ? Quelle que soit la raison de son revirement, ce n’est visiblement pas un « fuck yes! ». Donc c’est non. Supprimez son numéro et tournez la page.
La règle du « fuck yes! » peut aussi s’appliquer aux situations de couple. Ma copine a un collègue qui s’est marié parce que ça lui « semblait logique ». Quatre ans plus tard, il ne fait que tromper sa femme. Le mariage n’avait pas suscité chez lui un « fuck yes! » et donc il aurait dû dire non.
Parfois, la règle du « fuck yes! » donne des réponses différentes selon le niveau auquel on l’applique. On peut être enthousiaste à l’idée de devenir l’ami-e de quelqu’un sans pour autant avoir envie de coucher avec. Donc c’est oui pour l’amitié mais non pour le cul. On peut au contraire penser « fuck yes! » à l’idée de baiser comme des fous mais pas du tout partant-e pour passer du temps ensemble. Il suffit d’appliquer la règle à chaque niveau pour prendre une décision selon ce qu’on recherche.
S’attendre à une réaction enthousiaste ne veut pas nécessairement dire qu’on tombera en pâmoison au premier regard. Il n’y a même pas besoin d’être totalement convaincu-e qu’on est tombé-e sur la bonne personne. On peut répondre « fuck yes! » à la simple perspective d’apprendre à mieux se connaître. On peut répondre « fuck yes! » à la proposition de se revoir parce qu’il est en train de se passer quelque chose. On peut même envisager avec enthousiasme de se laisser quelques mois pour laisser les choses évoluer et voir si on arrive à régler nos soucis de couple.
La seule chose qui compte pour éviter de perdre son temps, c’est que les deux personnes ressentent de l’enthousiasme pour un projet commun.
Le grand mérite de la règle du « fuck yes! », c’est qu’elle simplifie tout le contexte des rencontres amoureuses. Quand on se tient à la règle, il ne reste éventuellement que deux problèmes.
Le premier problème, c’est quand on n’est emballé par personne. Si vraiment tout le monde vous laisse de marbre, soit c’est que vous n’avez vraiment pas de chance, soit c’est que vous bloquez vos émotions, peut-être pour vous protéger en vous empêchant de ressentir quoi que ce soit pour quiconque.
Il faut quand même se rendre compte que c’est à chacun-e de chercher ce qui peut nous plaire chez les personnes que l’on croise ; ce n’est pas à elles de nous le montrer. On est dans la vraie vie, pas dans une foire internationale. Il faut apprendre à savoir apprécier les personnes qu’on rencontre, et ça s’apprend. Alors allez-y. Ça ne veut pas dire qu’il faille tomber amoureux de tous ceux ou celles qui croiseront votre regard ; simplement que c’est à vous de prendre en main votre capacité à créer des liens avec les gens que vous rencontrez.
Le second problème, c’est quand on ne rencontre jamais personne à qui on inspire le moindre enthousiasme. Si de la part des personnes à qui on s’intéresse, on ne récolte que des râteaux ou des réponses mitigées, alors il faut commencer à s’améliorer soi-même. Il faut se demander ce qui chez soi pourrait inspirer d’autres personnes à se dire « fuck yes! ». Si la réponse n’est pas évidente, alors il faut se mettre au travail pour devenir quelqu’un qui puisse inspirer à d’autres un « fuck yes! ».
Et s’il ne doit rester qu’un seul conseil de séduction, c’est bien celui-là : qu’on soit homme femme, hétéro, homo, trans, furry ou que sais-je encore, la seule vraie recette de séduction, c’est de travailler sur soi-même. Tout le reste ne sert qu’à perdre son temps et à se débattre inutilement dans le marécage pour satisfaire son ego.
Parce que bien sûr, avec quelques trucs et astuces bien sentis, on peut manipuler une personne pour finir au lit, se mettre en couple et même en ménage. Mais pour gagner une bataille on aura perdu la guerre en sacrifiant la possibilité d’un bonheur durable.
[NdT : ou comme Sam Karmann tentait vainement de nous faire comprendre « on peut tromper une fois une personne, non enfin… »]
Traduction Audren